mercredi, décembre 13, 2006

Lettre ouverte — La lente agonie de la Société historique du Saguenay

Le 26 novembre dernier, j'avisais les lecteurs des Délires d'Akakia et les citoyens de ma région de la situation catastrophique dans laquelle nageait la Société historique du Saguenay. Par la même occasion, j'ai essayé d'attirer l'attention du public sur l'importance de préserver ce joyau unique de la mémoire collective francophone des Saguenéens et des Jeannois en espérant l'annonce de la mise en oeuvre d'un plan de redressement cohérent et prometteur de succès.

Or, comme la situation s'est dégradée depuis au lieu de s'améliorer et que la sortie subséquente du président de la SHS dans un journal local n'a fait qu'envenimer une situation déjà catastrophique et intenable, j'ai donc pris la décision de m'objecter en me retirant dans mes terres et en cessant de collaborer avec une administration qui, par son inefficacité et son entêtement à travailler en vase clos, a rompu le lien de confiance déjà ténu qui me liait à elle. La présente lettre ouverte rend grâce des derniers faits qui m'obligent à cette décision et de la nature de mon geste officiel.
Russel Bouchard


Lettre ouverte
Au Conseil d'Administration
de la Société historique du Saguenay
A/S M. Lorenzo Beaulieu, président
Chicoutimi, le 14 décembre 2006

Monsieur le Président,
J'ai pris connaissance ce matin de l'entrevue que vous avez accordée au nom du CA de la Société historique du Saguenay, au journal « La Pige » du 10 décembre (« Société historique – Le poste de d.g. est en péril », texte de Marianne Blais). Dans votre commentaire, vous annoncez votre intention de mettre à pied la directrice générale de la SHS sous prétexte « de la situation financière fragile de la Société historique » que vous dites pouvoir remplacer « par une secrétaire-téléphoniste » (sic !). Vous justifiez cette décision par le fait qu'elle « génère des dépenses de 35 000$ par année » (resic !), et vous dites croire qu'il y aurait eu chez cette professionnelle « trop de zones grises dans son fonctionnement » (!?!). Cela étant, sans crier gare, vous nous sortez d'un quelconque chapeau tenu par le bureau régional du ministère de la Culture (cette structure étatique qui nous coûte un bras et qui a bien du mal à démontrer le service réel qu'elle rend à notre région) un plan de relocalisation de la SHS. Vous nous annoncez ce plan, sans avoir eu la pertinence de consulter, au préalable, les chercheurs bénévoles qui contribuent à alimenter notre communauté sur le plan intellectuel, les détenteurs de fonds de recherches qui ambitionnent d'y ajouter un jour la somme de leur travail, ainsi que tous ceux et celles qui collaborent à la revue Saguenayensia avec autant de professionnalisme que de générosité.

Monsieur le président, considérant le fait que vous n'avez pas pris en compte les signaux que je vous ai envoyés dans ma lettre ouverte adressée aux journaux le 19 novembre dernier ; considérant le fait que vous avez manqué d'élégance et d'humanité en n'informant pas privément la directrice générale de vos intentions de la congédier et en ne l'instruisant pas des programmes qui auraient dû la concerner au premier titre ; considérant également le fait que vous n'avez pas hésité à jeter publiquement le blâme sur le dos de votre directrice générale, une professionnelle honnête et efficace qui a pourtant donné le meilleur d'elle-même compte tenu des carences financières et administratives de cette institution que nous vous avons confiée ; considérant aussi le fait que vous ne semblez pas avoir compris que le dernier fil qui tient la SHS en vie est justement la revue « Saguenayensia » et que cela ne semble pas vous inquiéter plus qu'il n'en faut ; considérant le fait qu'il y a dans les officines du CA de la SHS des malaises que personne sauf vous n'est capable d'expliquer ; considérant le fait que vous êtes le seul à avoir le pas dans cette histoire ; et considérant que le lien de confiance entre la direction de la SHS et moi est rompu, veillez considérez à votre tour : un, que je cesse de collaborer, comme par le passé, à la rédaction de textes pour la revue Saguenayensia ; deux, que la SHS perd —immédiatement— tous les avantages et legs que je lui avais consentis sur mon testament notarié ; et, trois, que j'entends retirer, dès que cela sera possible, les quelque 35 caisses de dossiers et documents déjà versés, et cela conformément au contrat de dépôt consenti qui me lie à la SHS.

M. le Président, avec tous les malheurs qui affligent depuis quelques années le Saguenay–Lac-Saint-Jean, comprenez que notre région n'a pas le moyen, mais alors là pas du tout, de perdre le cortex de sa conscience et de sa mémoire. Si cela devait arriver, si la Société historique du Saguenay devait cesser ses activités comme j'ai l'heur de le craindre aujourd'hui, il serait illusoire de croire qu'elle pourrait renaître à la vie dans un contexte socio-politique et économique aussi précaire. Cela étant, il faudrait alors placer une pierre tombale à l'entrée de la réserve faunique des Laurentides puisque la mort cérébrale confirmerait la mort létale de notre société régionale. J'espère sincèrement qu'il est encore possible d'éviter ce rendez-vous fatidique.

J'aurais préféré ne pas avoir eu à vous préciser que la Société historique du Saguenay n'est pas qu'une collection de documents et de vieux bouquins ; qu'elle est aussi et surtout une conscience, une âme accompagnatrice qui requiert un certain engagement de notre part. Je m'en voudrais de faillir à ce premier devoir envers elle...


Russel Bouchard
Historien

3 Comments:

Anonymous Anonyme
dit :

M.Bouchard, pourquoi ca semble bien fonctionné au Lac St-Jean et pas a Chicoutimi????

Je ne suis pas un historien, ni un chercheur mais j'ai toujours eu l'impression d'une meilleure disponibilité des gens des Sociétés historiques du Lac St-Jean versus celle du Saguenay.Ce n'est que l'humble opinion d'un amateur d'histoire du Saguenay.

3:03 p.m.  
Anonymous Anonyme
dit :

Il y a plusieurs raisons. Mais celle qui m'apparaît la plus profonde découle du fait que la SHS n'a jamais été en mesure de passer à une autre étape de son développement depuis la mort de Mgr Victoir Tremblay et de tous ses fondateurs. Il lui faut un souffle nouveau sur le CA et à l'exécutif, et ce souffle ne peut provenir que des plus jeunes, ce qui n'est pas le cas.

Comparativement à son homonyme du Saguenay, la Société d'Histoire du Lac-Saint-Jean n'est qu'à la première étape de sa vie. Lorsque ses fondateurs auront disparu, il faudra voir comment elle surmontera ce stress. Mais d'ici là, vous avez raison, cette dernière est infiniment plus dynamique que celle du Saguenay et reçoit du reste une aide substantielle de la ville d'Alma dont le conseil de ville a une plus grande sensibilité envers la culkture en général.

Russel Bouchard

3:18 p.m.  
Anonymous Anonyme
dit :

M. Villeneuve a tout à fait raison. à mon humble avis, c'est que les gens du lac Saint-Jean ont su faire un projet d'emsemble bien structurer. Le projet de la maison des batisseurs est un projet de 10 ans de travail et de travail d'équipe.
La SHS était bien parti,les activités étaient dynamiques, ont entendait parler d'elle régulièrement, la revue Saguenayensia est d'une qualité incroyable. Le nouveau souffle que la shs a eu est venu d'un renouveau et de jeunes. Cependant, je ne crois pas que le président présent soit un rassembleur pour mener à bien un projet de développement. Il faut savoir se retirer, chose qui n'est pas donné à tout le monde!

1:18 p.m.  

Publier un commentaire

<< Home