Les délires d'Akakia

lundi, décembre 25, 2006

Journal intime

Autant que faire se peut et quoi qu'il puisse en coûter, parfois, sur le plan de la sécurité, la vie doit invariablement rester une aventure. C'est le prix de la liberté.

Russel Bouchard, 25 décembre 2006

mardi, décembre 19, 2006

L'État bookmaker – « Bye-bye boss » !

On m'a enseigné, et j'ai toujours cru comprendre, que l'avenir du citoyen ne peut être autrement que dans son engagement inconditionnel envers l'avenir collectif dont il participe. Face à ses devoirs sacrés qui le lient à l'ensemble par le biais de l'État, le citoyen n'a guère le choix : ou il participe par son génie et son travail ; où il décroche et tente d'échapper à ses devoirs sacrés en profitant du labeur des autres, ce qui réduit d'autant les capacités de l'ensemble à construire une société plus juste, plus équitable, plus humaine, plus épanouie.

Ces derniers jours, un jeune couple de Saint-Jacques-le-Mineur, petite citée de la Montérégie québécoise, a eu la main chanceuse et a encaissé un chèque de... 27 M$ (millions de dollars). C'est le deuxième gros lot en importance, toutes sommes confondues de l'histoire déjà trop longue de la déshumanisante Loto-Québec ! Premiers commentaires des heureux multi-millionnaires $ : « On va partir pour quelque temps, histoire de redescendre de notre nuage. Je vais faire une pause. Je n'ai plus de patrons et plus personne ne me dira : tu es en retard ce matin. Bye-bye boss. »

Qu'on en rêve ou qu'on répudie par jalousie, qu'importe ! Une chose est sûre et certaine, la vie de ce couple vient de culbuter dans le délire le plus insensé. Devant une telle dérive de l'État, faut-il se surprendre que d'aucuns sortent de leur réserve dans laquelle ils s'étaient eux-mêmes enfermés pour fustiger le bon peuple d'être de moins en moins productif (dixit le Lucide !) ?

À cet égard, mon idée est faite depuis longtemps ! Quand un État entretient délibérément la confusion entre le Bonheur et la jouissance et qu'il accepte que l'équilibre des finances publiques soit expressément redevable à la faiblesse humaine et à ses pulsions qu'il titille comme le plus vulguaire des proxénètes. Quand les politiques sociales et la santé publique sont redevables à des monopoles d'État qui faisaient naguère la richesse du crime organisé. Quand l'Espérance d'un peuple, qui est cette sorte d'énergie sacrée sensée construire le devenir collectif, est confondue dans l'espoir au quotidien de gagner le million du samedi. Quand il ne reste plus au citoyen que les jeux de hasard pour capter son attention et l'empêcher d'aller se pendre au grenier parce qu'il a perdu tout espoir envers ses propres forces, on ne s'étonne plus de voir s'installer le désespoir qui conduit au suicide et au décrochage, de voir éclater jour après jour les solives de la fraternité qui supporte justement l'édifice de la solidarité humaine, première raison d'être de l'État et du politique.

Il y a mille et une manières d'établir une tyrannie : la moins subtile et la plus ancienne consiste à utiliser le mensonge et la violence pour maintenir le citoyen dans un état de peur perpétuelle ; la plus subtile consiste à éteindre son besoin de liberté et son initiative en le soudoyant par le vice et la facilité. La première a l'avantage d'attiser la haine du citoyen contre l'injustice dont il est victime et à garder son esprit constamment en éveil dans l'espoir de mettre fin à ce joug infect ; la seconde produit l'effet contraire parce qu'elle éteint son esprit dans une illusoire réussite dont il n'est du reste pas l'auteur.

Akakia

samedi, décembre 16, 2006

Joyeux Noël ! de la famille Bouchard à tous nos amis, visiteurs et collaborateurs

Souhaitons-nous mutuellement paix, bonheur et amitié dans ce petit bout d'Éternité que nous partageons ensemble.

Que l'an 2007 comble vos premiers besoins et vos plus pressantes attentes.

Akakia

mercredi, décembre 13, 2006

Lettre ouverte — La lente agonie de la Société historique du Saguenay

Le 26 novembre dernier, j'avisais les lecteurs des Délires d'Akakia et les citoyens de ma région de la situation catastrophique dans laquelle nageait la Société historique du Saguenay. Par la même occasion, j'ai essayé d'attirer l'attention du public sur l'importance de préserver ce joyau unique de la mémoire collective francophone des Saguenéens et des Jeannois en espérant l'annonce de la mise en oeuvre d'un plan de redressement cohérent et prometteur de succès.

Or, comme la situation s'est dégradée depuis au lieu de s'améliorer et que la sortie subséquente du président de la SHS dans un journal local n'a fait qu'envenimer une situation déjà catastrophique et intenable, j'ai donc pris la décision de m'objecter en me retirant dans mes terres et en cessant de collaborer avec une administration qui, par son inefficacité et son entêtement à travailler en vase clos, a rompu le lien de confiance déjà ténu qui me liait à elle. La présente lettre ouverte rend grâce des derniers faits qui m'obligent à cette décision et de la nature de mon geste officiel.
Russel Bouchard


Lettre ouverte
Au Conseil d'Administration
de la Société historique du Saguenay
A/S M. Lorenzo Beaulieu, président
Chicoutimi, le 14 décembre 2006

Monsieur le Président,
J'ai pris connaissance ce matin de l'entrevue que vous avez accordée au nom du CA de la Société historique du Saguenay, au journal « La Pige » du 10 décembre (« Société historique – Le poste de d.g. est en péril », texte de Marianne Blais). Dans votre commentaire, vous annoncez votre intention de mettre à pied la directrice générale de la SHS sous prétexte « de la situation financière fragile de la Société historique » que vous dites pouvoir remplacer « par une secrétaire-téléphoniste » (sic !). Vous justifiez cette décision par le fait qu'elle « génère des dépenses de 35 000$ par année » (resic !), et vous dites croire qu'il y aurait eu chez cette professionnelle « trop de zones grises dans son fonctionnement » (!?!). Cela étant, sans crier gare, vous nous sortez d'un quelconque chapeau tenu par le bureau régional du ministère de la Culture (cette structure étatique qui nous coûte un bras et qui a bien du mal à démontrer le service réel qu'elle rend à notre région) un plan de relocalisation de la SHS. Vous nous annoncez ce plan, sans avoir eu la pertinence de consulter, au préalable, les chercheurs bénévoles qui contribuent à alimenter notre communauté sur le plan intellectuel, les détenteurs de fonds de recherches qui ambitionnent d'y ajouter un jour la somme de leur travail, ainsi que tous ceux et celles qui collaborent à la revue Saguenayensia avec autant de professionnalisme que de générosité.

Monsieur le président, considérant le fait que vous n'avez pas pris en compte les signaux que je vous ai envoyés dans ma lettre ouverte adressée aux journaux le 19 novembre dernier ; considérant le fait que vous avez manqué d'élégance et d'humanité en n'informant pas privément la directrice générale de vos intentions de la congédier et en ne l'instruisant pas des programmes qui auraient dû la concerner au premier titre ; considérant également le fait que vous n'avez pas hésité à jeter publiquement le blâme sur le dos de votre directrice générale, une professionnelle honnête et efficace qui a pourtant donné le meilleur d'elle-même compte tenu des carences financières et administratives de cette institution que nous vous avons confiée ; considérant aussi le fait que vous ne semblez pas avoir compris que le dernier fil qui tient la SHS en vie est justement la revue « Saguenayensia » et que cela ne semble pas vous inquiéter plus qu'il n'en faut ; considérant le fait qu'il y a dans les officines du CA de la SHS des malaises que personne sauf vous n'est capable d'expliquer ; considérant le fait que vous êtes le seul à avoir le pas dans cette histoire ; et considérant que le lien de confiance entre la direction de la SHS et moi est rompu, veillez considérez à votre tour : un, que je cesse de collaborer, comme par le passé, à la rédaction de textes pour la revue Saguenayensia ; deux, que la SHS perd —immédiatement— tous les avantages et legs que je lui avais consentis sur mon testament notarié ; et, trois, que j'entends retirer, dès que cela sera possible, les quelque 35 caisses de dossiers et documents déjà versés, et cela conformément au contrat de dépôt consenti qui me lie à la SHS.

M. le Président, avec tous les malheurs qui affligent depuis quelques années le Saguenay–Lac-Saint-Jean, comprenez que notre région n'a pas le moyen, mais alors là pas du tout, de perdre le cortex de sa conscience et de sa mémoire. Si cela devait arriver, si la Société historique du Saguenay devait cesser ses activités comme j'ai l'heur de le craindre aujourd'hui, il serait illusoire de croire qu'elle pourrait renaître à la vie dans un contexte socio-politique et économique aussi précaire. Cela étant, il faudrait alors placer une pierre tombale à l'entrée de la réserve faunique des Laurentides puisque la mort cérébrale confirmerait la mort létale de notre société régionale. J'espère sincèrement qu'il est encore possible d'éviter ce rendez-vous fatidique.

J'aurais préféré ne pas avoir eu à vous préciser que la Société historique du Saguenay n'est pas qu'une collection de documents et de vieux bouquins ; qu'elle est aussi et surtout une conscience, une âme accompagnatrice qui requiert un certain engagement de notre part. Je m'en voudrais de faillir à ce premier devoir envers elle...


Russel Bouchard
Historien

samedi, décembre 09, 2006

Reconnaissance de la nation québécoise - Ne vous tournez surtout pas du côté des intellos québécois pour vous faire une idée...

« Au moment où la population se dit massivement d’accord avec la reconnaissance de la « nation québécoise » (70 % selon le dernier sondage CROP)» , écrit Antoine Robitaille dans Le Devoir du 7 décembre, nos chers intellos de la nation civique et inclusive (sic) continuent de fendre les poils de grenouilles en quatre pour tâcher de comprendre ce qu'ils sont les seuls à ne point avoir compris !

L'un d'eux, l’historien Jocelyn Létourneau, qui s'autoproclame émule de la « rigueur analytique » face à un espace public livré aux opinions », a alors tenté de faire comprendre à ses interlocuteurs abscons qu'il fallait envisager le terme « nation » « dans sa définition la plus large », c'est-à-dire... « détaché d’une perspective prescriptive », et qu'il fallait comprendre que « cette société n’existe pas comme nation, du moins pas encore, puisque tous les membres ne s’y « reconnaissent pas ». Ce qui contraignit mortellement le sociologue dumontiste Jean-Jacques Simard qui jugeait, pour sa part, « que le Québec consistait plutôt en une « société globale ».

J'abandonne ! Si vous avez compris quelque chose à ce charivari d'intellos à la con, faites-moi signe et expliquez-moi je vous prie ! Ça se peut tout simplement pas ! Il n'y a vraiment rien qu'ici, au Québec et au Canada, où cette sorte de discussion sur le sexe des anges peut encore se faire sans que ceux qui y participent comprennent qu'ils sombrent dans le ridicule et le pathétique.

Pourtant pas si compliqué : Nation = « Groupe humain, généralement assez vaste, qui se caractérise par la conscience de son unité (historique, sociale, culturelle) et la volonté de vivre en commun ». Cf., Le Petit Robert, Paris, 2001, p. 1652.

Tout est là. Comment peut-on perdre son temps et divaguer à ce point ?! On en dira ce qu'on voudra, c'est cela, la définition du Petit Robert, qui a été reconnue par le Parlement Harper. Le libelle que le Parlement canadien y a attaché ne concerne que ce Parlement. Le fait est tout ce qu'il y a de plus simple : le Québec est une Nation, au sens propre et figuré. Et il n'incombe à personne d'autres que ceux et celles qui partagent cet univers politique spécifique (car c'est de politique qu'il s'agit lorsqu'on traite de nation) d'affirmer ce qu'ils sont et de se définir comme ils entendent être définis. Les autres nous regardent de la manière qu'on veut qu'ils nous regardent. Et, dans ce cas-ci, nous avons l'air à une belle bande d'idiots...

Russel

lundi, décembre 04, 2006

Stéphane Dion, élu chef du Parti libéral du Canada au 4e tour ! « La mâchoire m'a tombé »

Ce qu'ils en disent

Que pensez-vous de la victoire des plus imprévues de Stéphane Dion ?

« La mâchoire m'a tombé quand j'ai appris ça » (sic), opine tout sourire un badaud de la plus belle eau dans le Journal de Québec de ce jour. J'adore cette sorte de naturel à la canadienne-française ! Une poésie en soi pour la vérité dont cette émotion est porteuse. Très typique du reste de ce que nous sommes. Il ne manque que les cretons sur les tosses et le sirop d'érable sur le coin de mon journal.

« Sitôt élu, sitôt critiqué », tant par les souverainistes que par les conservateurs, écrit Alexandre Shields dans Le Devoir de ce lundi de la veille. « Son rôle dans l'élaboration de la Loi sur la clarté référendaire, son intransigeance dans le dossier du déséquilibre fiscal et sa reconnaissance timide de la nation québécoise figurent au nombre des griefs qui lui ont été adressés. » Dans la plus belle tradition du Devoir, le pot de fleurs, la terre en sus, sans le contenu souhaité. Jamais dans ce pays sans mon Pays !

« Un cadeau pour la souveraineté », décrète Bernard Landry, l'homme qui sait tout mais qui n'a rien su faire quand il en avait le pouvoir et le devoir. « Toute une côte à remonter s'il veut gagner la confiance des Québécois », vaticine André Boisclair, qui vient d'en rajouter un autre petit bout dans sa cassette. « S'il veut vraiment gagner l'élection qui s'annonce, prédit Marco Fortier dans Le Journal de Québec, il devra prendre un cours de « personnalité 101 », car « il a une poignée de main molle et il ne vous regarde pas dans les yeux ». Les souverainistes et les conservateurs vous le diront en se frottant les mains sur le coeur, comme le fait ce matin M. Landry qui se réjouit à sa manière : « Cette venue va aider la réflexion sur la souveraineté et aider le reste du Canada à comprendre ce que nous sommes ».


Stéphane le mal aimé

Et patati ! et patata !...

L'anti-héros, même pour les libéraux défaits qui n'en n'avaient que pour Ignatieff ou pour Rae, bon deuxième et mauvais troisième. Le type est marqué au fer rouge dans tous les journaux du Québec, même dans la plupart, les prônes paroissiaux s'il s'en imprime encore. Tout ce qu'on écrit sur le bonhomme depuis dimanche s'écrit par les points d'exclamations ! Aucun point d'interrogation ? Et surtout pas de point final. Ce qui s'en vient est à suivre, n'en doutons surtout pas. Points de suspension...

Des huit candidats qui briguaient les suffrages, Dion était le plus insignifiant, le plus cassant, le plus méprisé, le plus mal aimé sinon le plus détesté. Et... il l'a remportée le bougre, en battant la coqueluche de ces dames, Michael Ignatieff, au quatrième tour du scrutin avec un score de 54,7%. Sans équivoque ! Au sein même du PL, 24 heures avant l'élection, l'intello du Parti était loin d'avoir la cote. Il pouvait compter ses amis sur les doigts de la main droite dites « je le jure » ! Ce matin, il n'a plus assez de ses deux mains et de ses deux pieds pour les compter dans son entourage qui s'est de suite rallié derrière lui. Dans une semaine, n'en doutons surtout pas, ces libéraux vont tous lui prêter serment d'allégeance, croix de bois croix de fer. À mettre une croix sur la cheminée.


Ce que j'en pense

Personnellement, je vous avoue qu'avoir été libéral ce soir là, Stéphane aurait été mon dernier choix. N'importe qui mais pas lui grand Dieu du Ciel bleu ! Sa petite tête proprette de premier de classe et d'intello des années cinquante ne m'est jamais revenue.

Ce matin, j'ai changé mon impression (j'ai bien dit impression). Pourquoi ? Certainement pas pour son programme électoral que je ne connais pas, et encore moins pour son passé politique qu'il me faut répudier si je me fie à l'impression de ses détracteurs et si je ne veux pas recevoir des tomates. Ce que je reconnais par contre chez ce diable d'homme (je n'ai pas dit « aime »), c'est ce que je détestais de Trudeau lorsqu'il s'est retiré de la politique : sa détermination ; sa capacité d'aller là où il croit qu'il doit aller même s'il est le seul à le vouloir ; sa rigueur intellectuelle ; et sa connaissance des ressorts qui font se mouvoir une société humaine. Qu'elle soit bonne ou mauvaise, qu'on l'aime ou qu'on ne l'aime pas, notre Stéphane national a une idée de son Canada.

Dure ou pas, cet échappé de rodéo est un fonceur. Il a une idée du pays. La sienne ! Bonne chance à celui qui voudra l'enfourcher et la modeler en fonction de son propre menu. Pour une fois, en vingt ans, les Canadiens vont savoir où ils vont. Et les Québécois, peuple amphigourique entre tous, vont enfin devoir se faire une idée où il veulent aller, eux ! Une direction, droite ou gauche, au pas de course ou au petit trot, mais en avant sapristi et à grands coups de cornes dans les flancs ! Voilà ce que j'apprécie de cette nouvelle donne que nous offre l'échiquier politique canadien avec l'arrivée de Dion.

Vous voulez que je vous dise encore : j'ai vraiment hâte de détester ce garçon...

Russel Bouchard

samedi, décembre 02, 2006

L'art au pays du Québec, un mort qui s'ignore !

Dans le plus paisible pays du monde, au Pays du Saguenay, le royaume de la soumission, terrain de jeu de prédilection de la « nation québécoise » unie et bienheureuse, un artiste de Chicoutimi, sculpteur de son état, ose enfin se lever pour dire qu'il n'accepte pas cette loi infecte décrétant qui est artiste et qui ne l'est pas, qui est bon qui est mauvais.

Il était plus que temps ! Y en a marre de voir des bleuets de terre cuite et des montages de lingots d'aluminium pour nous démarquer à travers le tout, pour nous identifier à travers les morts de ce cimetière de la création qu'est devenu le Québec communautariste.

Pages 2 et 3 du journal Le Quotidien, une place de choix dans cette sorte de médium, le chroniqueur Daniel Côté nous présente le combat de ce sculpteur, Jean-Marie Laberge, qui jette un véritable pavé dans la marre de la soumission intellectuelle. Pomme de discorde qui oppose ce sculpteur aux diktats d'une conformité institutionnalisée et la collusion incestueuse entre l'Université du Québec à Chicoutimi et le ministère des Affaires culturelles du Québec, les jurys de sélection, l'antre d'une indécrotable clique qui se partage les rubans bleus, blancs, rouges, et les subventions.

« J'ai pensé —dit le sculpteur, en évoquant le dépôt de son projet pour créer une oeuvre figurative destinée à un carrefour giratoire de l'ex-ville d'Arvida— que j'aurais des chances parce qu'il n'y aurait personne de l'UQAC sur le jury, comme pour le 1% ». « J'ai soumis des croquis, un projet d'oeuvre figurative, mais la ville a formé un jury comprenant une personne représentant l'université et une autre provenant d'un centre d'exposition. Si j'avais su, je n'aurais pas participé. C'était une perte de temps », estime Jean-Marie Laberge.

Évidemment ! Dans les circonstances actuelles, le résultat n'aurait pu être différent. Ce monsieur mérite notre encouragement. Il va en avoir besoin. Car la croûte qu'il essaie de défoncer est solide et il en faudra bien d'autres.

Akakia


À Jean-Marie Laberge
Chicoutimi, le 2 décembre 2006
M. Laberge,
Félicitations pour la sortie de ce matin dans Le Quotidien ! Ce genre de critique s'impose depuis longtemps. Le journal a fait du bon travail en vous laissant cette formidable tribune pour vous exprimer. Le conformisme n'a pas sa place partout où l'intelligence et l'art sont sollicités. N'ayez pas peur de la controverse que cela risque de soulever. Si elle s'avère, elle sera saine et profitable. C'est certain ! Laissez-les dire. Pour une fois que les artistes auront de quoi dire. Ils en ont perdu l'habitude...

Cette région aurait besoin d'un coup de fouet de ce genre une fois par semaine pendant dix ans pour sortir de sa mortelle léthargie. L'art est un indicateur de notre santé mentale, de notre désir de vivre. Que ce soit pour l'histoire, le patrimoine, ou l'art en général, le ministère de la Culture du Québec qui sévit en région, ici comme ailleurs depuis déjà trop longtemps, est une vraie plaie. Vitement un gouvernement pour remettre à l'ordre du jour la pertinence d'un tel office, cette sorte de tribunal de la pensée conformiste et sécuritaire qui s'accouple par nature avec tout ce qui est institution, les gardiennes du statuquo.

La conséquence de cette dérive, j'ai eu à la vivre à tous les jours depuis les 35 dernières années. L'expérience m'a appris que les vrais artistes, les vrais historiens, les vrais sculpteurs, c'est-à-dire ceux qui n'ont pas le goût de se faire récupérer dans la gadoue de la République des médaillés, sont inévitablement condamnés à vivre leurs passions dans la solitude et dans le mépris des institutions de la récupération, c'est ferrailleurs de la créativité sous toutes ses formes. Ils sont partout ! Partout où il y a un dollar public à ramasser, partout où on s'applaudit, partout où le système qui nous étrangle risquerait, un tant soit peu, d'être mis en doute, malmené, projeté au-delà de son temps.

On a oublié, ici comme ailleurs, que l'art est une rébellion en soi, un refus de se soumettre à l'ordre du temps, une prise en charge de la pensée individuelle sensée projeter et stimuler l'avenir du groupe...

Delenda Carthago !
(Il faut détruire Carthage)

Russel Bouchard

vendredi, décembre 01, 2006

La «Nation québécoise Inc.» ! Quand les deux parents portent les mêmes gènes déficients, il y a à parier que l'enfant à naître sera taré...

Le gène défectueux

Ceux qui suivent l'affaire auront sans doute été eux-mêmes surpris par l'ambiguïté du résultat. Le Québec a-t-il gagné ou perdu au change avec la reconnaissance officielle de la « Nations québécoise dans un Canada-Uni ». Retour à la case départ ! L'Union de 1841, version 2006 ! Tout ça pour en arriver là. L'auteur de la « nation civique franco-québécoise» (ce qu'il appelle aujourd'hui... « ouvrir le cercle de la nation », un lapin dans le chapeau !), n'est pas heureux de ce résultat auquel il a pourtant tant et si bien contribué. 

Maintenant que tout tourne à l'aigre doux, ce Maître ès-Art de l'imprécision sibylline essaie de tourner à son avantage sa fameuse déclaration de 1999, portant sur « les souches » canadiennes-françaises qu'il fallait à tout prix « jeter dans le feu de la St-Jean ». Un discours mécaniquement perpétué dans la ligne éditoriale du journal Le Devoir qui n'a pas su rendre à bon port la mission dont il s'était lui-même doté. Aujourd'hui, l'auteur et ses commensaux journalistiques nous disent que nous avons mal compris, que nous n'avons pas su lire entre les lignes. C'est n'importe quoi !

La « Nation québécoise dans un Canada-Uni » ! Une belle manière d'accentuer la médiocrité québécoise, de l'assujettir à l'ensemble canadien à défaut de l'assimiler puisque cette différence sert bien le nationalisme canadien.


La mise en place des nationalismes autochtones

Autre point que m'indique ce commentaire publié ce matin, 1er décembre, dans Le Devoir qui sert toujours de minaret à cette sorte de discours : l'identité « canadienne-française » ne sait pas mourir malgré tout ce que ces intellos ont fait et font encore pour la diluer dans la « nation civique » (ce dont l'auteur même du concept prend également bien soin de ne plus évoquer dans ses écrits).

Au-delà du pathétique que nous inspire un tel résultat, ce qu'il faut effectivement voir dans tout ça, c'est que tout bouge très très vite chez nous. Un courant se dessine de plus en plus, un courant qui nous amène vers une nouvelle dualité ethno-culturelle québécoise, peut-être un indicateur d'une tendance universelle, qui sait !? Et les sorties de plus en plus agressives contre le communautarisme à la québécoise dont ces gens sont du reste les principaux chantres, témoignent d'un ressac de l'histoire, un retour imprévu dont les manifestations socio-politiques deviennent de plus en plus visibles avec l'émulsion des nationalismes autochtones pan-canadiens (pas seulement Indiens, mais désormais, aussi et notamment Canadiens français et Métis).


La Nation québécoise Incorporated

Pouvait-on espérer un autre résultat ? Pouvait-on espérer mieux ? Évidemment non ! C'est ce qui arrive quand un pays (le Québec) a perdu son sens par la bouche de ses faux prophètes et qu'il fait de l'histoire à la carte, selon les besoins du moment, selon la rentabilité de l'émotion nationale, selon les contraintes du marché international. Avions-nous franchement besoin de cette autre preuve ! L'échec national passe par ces plumes épointées. Ils ont sollicité des ressorts dont ils n'ont pas le contrôle, dont ils n'ont du reste jamais eu le contrôle. La conséquence crève aujourd'hui les yeux ! Il n'y a plus de place à l'incertitude : ou la mécanique se casse, ou elle s'emballe !

Faites vos mises...

Russel Bouchard


Le Devoir
POLITIQUE, vendredi 1 décembre 2006, p. a3
Motion sur la nation
Un recul pour le Québec, selon Gérard Bouchard

Robitaille, Antoine

Québec - Ce que l'Assemblée nationale a salué hier par une motion unanime est au fond une ruse électorale et fédéraliste qui fait reculer le Québec, estime le renommé historien et sociologue Gérard Bouchard, une des principales figures intellectuelles du débat sur la nation des 15 dernières années. Selon M. Bouchard, les souverainistes sont perdants dans cette histoire puisque leur nation est maintenant associée à celle d'un «Canada uni» et aussi parce que le texte de la motion ramène l'idée d'une nation canadienne-française.

L'intellectuel, frère de l'ancien premier ministre Lucien Bouchard, trouve «déconcertant» que le Bloc québécois ait «engagé tout le mouvement souverainiste dans son geste d'association du concept de nation québécoise à l'idée d'un Canada uni». Or ce geste est fort, insiste M. Bouchard, car il a été effectué «de la manière la plus formelle qui soit: par un vote des Communes!». «Ça va être dur à renverser, ça», a-t-il dit hier depuis son bureau à l'Université du Québec à Chicoutimi. «Et on raconte que cela a recueilli l'appui des ténors souverainistes au Québec, ce qui rend la chose encore plus troublante pour moi», a-t-il dit.

Diversité Les travaux de Gérard Bouchard sur la nation, depuis le milieu des années 90, ont suscité beaucoup d'intérêt et ont été largement commentés. Parmi ceux-ci, citons notamment La nation québécoise au futur et au passé, (VLB éditeur, 1999) ou Genèse des nations et cultures du Nouveau Monde (Boréal, 2000). Gérard Bouchard a pris le contre-pied du grand sociologue Fernand Dumont, qui refusait de parler de «nation québécoise» tant que le Québec ne serait pas souverain. Avant ce grand soir, aux yeux de Dumont, la nation, c'était le Canada français. Bouchard, lui, a développé une conception de la nation politique québécoise refondée sur sa diversité. En 1999, certains ont même cru qu'il voulait carrément liquider le passé canadien-français lorsqu'il avait écrit dans nos pages: «Tous ensemble, jeter les souches au prochain feu de la Saint-Jean? Pourquoi pas? Avec l'espoir raisonnable qu'à la longue, il pourrait naître de ces cendres (parmi quelques inévitables bleuets?) une espèce renouvelée, enrichie, comme il arrive parfois.»

L'historien et sociologue n'a de cesse de répéter qu'il faut «ouvrir le cercle de la nation». Dans le débat des 15 dernières années, la nation a été selon lui une manière d'inclure les communautés culturelles, les néo-Québécois, dans la définition même de ce qu'est un Québécois.

Or, avec la motion votée cette semaine à Ottawa et saluée hier à Québec, ce «profit sociologique risque d'être dilapidé». La motion de Stephen Harper comprend le mot «Québécois» même en anglais. Voilà en somme l'idée d'une nation canadienne-française «d'un océan à l'autre» qui montre de nouveau le bout de son nez. Il remarque que les libéraux fédéraux ont ramené ces jours-ci cette vieille idée en échafaudant une théorie des «trois nations»: anglaise, française et autochtones. «Ce n'est pas la nation québécoise au sens où on l'entend, nous, dans nos débats. On est en train de revenir à des débats qu'on pensait réglés. C'est pour ça que je dis qu'on a perdu.»

Plusieurs se réjouissent de voir disparaître la notion de «société distincte». Gérard Bouchard fait remarquer qu'au moins, dans Meech, «il y avait une promesse d'une inscription constitutionnelle, ça s'accompagnait d'un petit réaménagement des pouvoirs face à Ottawa. Cette semaine, on a reculé, c'est évident». Il s'étonne de voir que malgré cela, les Canadiens anglais sont encore «plus dressés contre cette motion sur la nation qu'ils ne l'étaient contre Meech». Aujourd'hui, les «vrais problèmes ne sont même plus abordés»: réforme constitutionnelle, redistribution des pouvoirs, rapatriement de points d'impôt. «Comment peut-on parler de gain? Je ne comprends pas», dit Gérard Bouchard. Même s'il risque de perdre quelques plumes dans le ROC, «le seul gagnant ici, c'est Stephen Harper», estime M. Bouchard.